mercredi 28 octobre 2009

A la Porte des Lilas /
A la porte de Paris


image issue d'un article posté par tarbihlkasso sur hns-info

Vendredi 23 Octobre le cycle Invisibles a débuté avec la projection du film L'Exil et le Royaume. Nous avons eu le plaisir d'accueillir un des deux réalisateurs, Andreï Schtakleff, et la monteuse, Alexandra Mélot, de ce documentaire hors-normes.
Ce long film pose un regard nouveau sur la ville de Calais, les conditions de vie des migrants et de ces personnes prêtes à tout pour les aider. Andreï Schtakleff qui a côtoyé pendant trois ans cette réalité qu'on voudrait dissimuler, a livré un témoignage inattendu assez loin par moments des archétypes et des fantasmes propres à la question de l'immigration clandestine. Le parti-pris des réalisateurs de ne montrer que rarement à l'image ces visages en exil, parfois caricaturés par les médias, a suscité des réactions contradictoires qui ont nourries le débat.

A l'occasion de cette soirée nous avons proposé à notre public de constituer une cagnotte pour soutenir le groupe d'hommes "Sans papiers", salariés intérimaires de SELPRO, travaillant pour le sous-traitant La Suburbaine, qui depuis deux semaines sont en grève et occupent le chantier du tramway des Maréchaux à la Porte des Lilas.
Aujourd'hui on peut compter neuf tentes, installées à l'intérieur d'un cercle de barrières sur le boulevard Mortier. Comme si leurs revendications n'étaient pas assez claires, cet emplacement à la frontière de Paris, devient une métaphore violente de leurs conditions de survie dans un non-lieu d'exclusion, d’attente et d'injustice, la France.

L'Association Khiasma, aux portes de Paris, dédie cette soirée à leur lutte.

Pour voir l'entretien avec Andreï Schtakleff

Pour signer la pétition

Pour lire et s'informer :

(les textes sont téléchargeables gratuitement, leur mise en vente permet le financement des associations):

- Sangatte : un non-lieu pour des non-gens, Olivier Aubert

- La loi des "jungles" : la situation des exilés sur le littoral de la Manche et de la Mer du Nord étude menée par le CFDA

- Publications sur les site du Gisti

- Rapports d'observation sur le site de la Cimade

- Publications sur le site de l'Anafé

- "S'informer" sur le site du CAAR

- "Documentation" sur le site du Ssaé

- Publications sur le site du Gas

- le blog de sans-papiers.org

- Le site du 9ème collectif des sans-papiers

- Le site de Droits Devant!






lundi 12 octobre 2009

Ce qui arrive


Avec le cycle Invisibles qui débute le 23 octobre prochain par l'Exil et le Royaume, j'ai voulu continuer à fouiller, avec la complicité de Nathalie Joyeux, ce terrain un peu vague entre le documentaire et le cinéma d'artiste. J'écris "entre" mais, il serait plus juste de dire "à la rencontre". Pour moi, il s'agit d'un point où deux histoires se rencontrent.
Celle du documentaire, dont je ne suis pas spécialiste, je l'ai d'abord approché au travers de collaboration et de longues discussions avec Jean-Michel Cretin (qui dirige aujourd'hui la programmation cinéma du Théâtre de l'Espace à Besançon) et maintenant avec Nathalie Joyeux, devenue réalisatrice après un passage par la direction d'un cinéma (Le Trianon à Romainville).
De toute évidence, ce qui m'a attiré dans le documentaire (et c'est assez trivial) c'est ce potentiel rapport au réel que semble avoir totalement abandonné tout un pan du champs de l'art. La réactivation des questions ouvertes dans les décennies 60 et 70 n'est aujourd'hui à mes yeux souvent - pas toujours- que de l'ordre du simulacre, de l'esthétique de la reprise, du design (c'est-à-dire de l'enregistrement d'un signe et non d'un récit) , une perception superficielle des perspectives et de la puissance du discours de pièces qu'elle utilise comme substrat. Quand ce n'est un pas un abandon pur et simple de toute perspective politique au nom de la mort des grands récits. Il est un peu périlleux, voire inélégant, de prononcer le terme politique dans bien des contextes de diffusion artistique aujourd'hui. Nous dirons donc non plus politique mais "ce qui arrive". Et c'est bien la présence de "ce qui arrive" dans le documentaire qui m'a attiré. Cependant, ce qui arrive ne se déroule pas uniquement dans la vie mais aussi dans les images, dans un moment de l'image qui nous oblige dans le même mouvement à interroger ce que nous percevons et la manière dont nous en faisons récit. A cet endroit, le documentaire m'a souvent déçu, empêtré justement dans ce que le réel semble nous dire, recherchant une illusoire vérité et incapable de dire un réel nouveau, alternatif. Une autre version de l'histoire, une autre manière de parler le / du réel. Car l'enjeu est évidemment dans le langage, qu'il soit composé d'une séquence d'images ou d'un texte, d'une voix. C'est la capacité à inventer un langage propre, à dégager le langage de la gangue publicitaire (qui a déjà consumé le champs de la politique à défaut du politique tout entier)
Aussi, de l'autre côté de ce croisement, il y a ce cinéma qui n'a pas de nom et qu'on dira cinéma d'artiste ou vidéo d'artiste. Ce cinéma, que je connais mieux que le documentaire n'en est pas un à proprement parler. Au sens, qu'il a éliminé le dispositif du cinéma (le rendez-vous, les fauteuils rouges et probablement une part de l'érotisme cher à Godard - en somme sa tautologie de lieu-art) pour explorer d'autres horizons tant dans la manière de montrer les images que de considérer leurs statuts. Pour le programme Invisibles, c'est un endroit singulier de ce champs que je souhaitais mettre en regard avec le documentaire, celui des artistes qui travaille le récit. Récit, au sens large, car ici la forme est probablement plus lâche, fragmentée. Un récit où il reste de la place pour celui qui regarde et "se fait" une histoire.

vendredi 9 octobre 2009

Lecture(s) de Bouche(s) à Strasbourg!

photographies © Matthieu Gauchet

Samedi 3 octobre 2009, Lecture(s) de Bouche(s) à l'Aubette dans le cadre du festival Ososphère à Strasbourg!
Petite histoire: dans ce long immeuble de facture néoclassique, la conception d'un vaste complexe de loisir et de restauration est confiée en 1922 à Theo van Doesburg, en collaboration avec Jean Arp et son épouse, Sophie Taeuber-Arp. Sur le plan artistique, l'Aubette s'inscrit dans l'avant-garde des années 20 et devient pour certain la "chapelle Sixtine de l'art moderne". Défraichie, abandonnée, elle sera finalement en restauration à partir de 1985 puis 2004. C'est donc dans le tout nouveau foyer-bar classé monument historique et à peine ouvert au public que Lecture(s) de Bouche(s) a pris place!



jeudi 8 octobre 2009

« Braseros en vadrouille… »



C’était il y a un an… Quelqu’un se souvient-il de la curieuse incursion automnale au quartier des Sentes aux Lilas da
ns le cadre de la biennale Art Grandeur Nature 08?Tous les matins, pendant près de quatre mois, en allant et en rentrant de l’école, les élèves des écoles maternelles Calmette et Courcoux ont dialogué avec ces étranges êtres immobiles qui émettaient des sons venus d’ailleurs et de la lumière produite par magie.
Les Braseros de Christian Vialard n’ont certainement pas laissé insensible.
Invisibles ou irritants pour certains, ils ont stimulés les imaginaires des autres qui ont parfois trouvé au sein du cercle un espace protégé au milieu de la nuit ou une aire de jeu originale. Enfin, ils auront initié en 2008 et 2009 des réflexions et des expérimentations sur la place du son dans notre appréciation du réel.
Les Braseros ont d'abord été le réceptacle de la mémoire et des réactions des habitants du quartier des Sentes.

Avec le projet Basse Continue mené par l’association Khiasma, les équipes enseignantes des écoles maternelles Courcoux et Calmette se sont appuyées sur l’installation et la proposition de Christian Vialard pour construire leur projet pédagogique de l'année 2009. Leurs jeunes élèves ont réalisé des travaux d’arts plastiques, des objets sonores et des contes enregistrés.

Aujourd’hui, après avoir été exposés lors du festival CitySonics de Mons et Sonorama de Besançon, Les Braseros reviennent sur leur terre natale*, l’Alsace.
La Laiterie de Strasbourg les a accueilli, grâce à la complicité de Transcultures, du 25 Septembre au 4 octobre 2009 dans le cadre du festival Ososphère lors des nuits électroniques.

...*Pour la petite histoire : les 22 braseros, qui composent le grand cercle, dans une vie précédente ont vécu à Sarre Union à 55Km de Strasbourg chez l'enseigne Eckes-Granini en contenant de la purée de fruits...



Les Braseros
continuent donc leur voyage et ils croisent en chemin la vidéo-performance de Patrick Fontana, Lecture(s) de Bouche(s), programmée dans le même festival.
Après une première semaine de représentations à l’Espace Khiasma, Lectures de Bouches a été invitée en mars à la Maison des Métallos pour la soirée de clôture du festival Cladestin organisé par la revue Mouvement et en juin au 104 dans le cadre de la première édition du festival Paris en toutes lettres.
Samedi 3 Octobre il ya eu lieu la dernière halte à l’Aubette de Strasbourg dans le cadre du festival Ososphère.

A suivre…

Pour découvrir le travail de Christian Vialard
et écouter Les Braseros
Pour découvrir la vidéo-performance Lecture(s) de Bouche(s)


jeudi 1 octobre 2009

Riches! n°3 à Khiasma avec Till Roeskens



photographies © Matthieu Gauchet

Nous avions quitté Till Roeskens en mai dernier avec Sélestat, tentative d’épuisement d’une ville par le discours et l’image (en clôture de sa carte blanche à Khiasma dans le cadre de Relectures 7) Dans cette conférence-performance fleuve -1h30 – construite comme une fausse visite guidée, l’artiste allemand traversait avec entrain toutes les strates d’une commune ordinaire pour nous offrir une légende à la fois banale et troublante.

Sélestat c’est ce mille-feuille qu’on ne croit jamais pouvoir finir mais que, par gourmandise, on grignote au-delà de la faim. C’est un désir contradictoire de voir s’achever ce qui est, de contempler ce que le discours met en mouvement en même temps qu’il le tue.



Nous gardions aussi en mémoire un autre voyage, en Israël celui-ci, raconté plus tôt dans la soirée à partir d’un album où les photos ont disparu. L’artiste marchant dans les pas de sa propre enfance, rejouant une candeur disparue, y lisait les légendes survivantes sur des pages blanches. Entre ces deux performances, nous avions découvert en quatre films (1) une œuvre vidéo délicate, obsédée par le hiatus entre le territoire et sa représentation. Roeskens cherche son chemin et nous avec lui. Sans carte. Ou plutôt sur le fil d’une carte mentale, sans cesse réinventée, dans le lieu fragile de la mémoire, du glissement de terrain.


photographie © Matthieu Gauchet

Nous le retrouvons au même endroit le mardi 29 septembre. Avec une égale éloquence. On comprend mieux ici sa filiation avec Joseph Beuys dans ce jeu de conférence qui est un peu plus qu’un jeu. Till Roeskens habite les textes et les discours des autres, les amplifie comme on le dirait d’un dispositif électronique. Nous sommes loin du jeu de simulacre et de la conférence comme pure forme. Car l’artiste se veut aussi passeur, transmetteur. Ici ce sont des extraits et des notes de lecture de livres de Magrit Kennedy (2) Libérer l’argent et Monnaies Régionales ou encore du trop méconnu Silvio Gessel (3) et ses monnaies fondantes. Et tout y passe ; des petites au grandes histoires, des courbes d’intérêts exponentielles à l’inflation et au mythe de la croissance infinie. Bien sûr, il reste toujours cette étrange manière de se glisser dans la voix d’un(e) autre qui rend les actions de Roeskens tout à fait intrigantes et indéniablement drôles. Mais le défi de cette nouvelle proposition est bien de donner à entendre des hypothèses alternatives à la monnaie, de les mettre en jeu, en mouvement, d’utiliser le discours comme un acte performatif qui ouvre un champ du possible, le concrétise. C’est une parole non-experte fabriquée à partir de discours d’experts. Forcément troublante.


Till Roskens et Olivier Darné (© Sylvain Victor)

Et c’est évidemment bienvenu pour cette troisième rencontre du cycle Riches ! qui accompagne pendant un an l’accueil du Parti Poétique et de son projet de Banque du Miel. Car Khiasma s’est proposé de participer à cette résidence départementale (qui est passé par Noisy-le-sec, Montreuil et aujourd’hui le Blanc-Mesnil) non pas à partir d’une installation de ruche mais en filant la métaphore qu’elle offre. Telles des abeilles, produire collectivement et partager un butin d’idées à partir d’ateliers publics de recherche, de discussion, de débat comme nous l’avions déjà expérimenté avec la proposition de Jean-Charles Massera et Eric Arlix, la résidence Viva Démocratie ! Echanges à bâtons rompus en tentant autant que possible de briser la hiérarchie qu’imposent les paroles expertes. Chacun dépose dans le pot commun ses idées, ses pistes. Cela ne va pas sans un certain chaos, mais révèle un désir de sens dans un moment de dérive d’un système sans projet.
Dans le même temps, des ressources (compte-rendu d’expérience, sites de partage…) et des vidéos sont mises en ligne sur le site de Khiasma –entretiens d’experts, performance d’artistes, lectures- à la manière d’une boîte à outils où chacun pourra piocher de quoi fabriquer sa pensée. Un temps fort est prévu au printemps 2010. En attendant quelques pistes héritées de la belle rencontre de ce mardi 29 septembre où le public s’est déplacé en nombre :

1- Pour découvrir La Banque du Miel et ouvrir un compte épargne-abeille

2- Voir Libérez l’argent, la performance de Till Roeskens (à venir)

3- Pour lire et s’informer sur les monnaies et les systèmes d’échange alternatifs


- The Transitioner
http://people.thetransitioner.org/
- The flowplace
http://flowplace.webnode.com/francais/faq-/
- Aises (Association Internationale pour le soutien aux Economies Sociétales)
http://www.aises-fr.org/
- SEL
http://selidaire.org/spip/
- SOL
http://www.sol-reseau.coop/
- DERUDDER Philippe, Les dix plus grands mensonges sur l’économie, Editions Dangles, 2007
- DERUDDER Philippe, Le Burtering Ouvert, 2009
- LIETAER Bernard
- La face cachée de la monnaie, JournArles, 2008

4- Découvrir le travail de l'artiste Till Roeskens

5 -Voir la vidéo De la propriété

Notes :

(1) liste des films de la carte blanche Till Roeskens à Khiasma (mai 2008)
MOTS / CHOSES (2004 - 6’50)
DE LA BASE AÉRIENNE 110 À LA PAIX SE RÉVÉLANT À L’HUMANITÉ (2008 - 16’26)
LITTLE FENCE MUSIC (2004 - 3’35)
VIDÉOCARTOGRAPHIES : AÏDA, PALESTINE (2008 - 45’)
Grand Prix de la Compétition Française au festival 2009 du FID Marseille

(2) KENNEDY Magrit, Libérer l’argent de l’inflation et des taux d’intérêts, Editions Vivez Soleil, 1995
KENNEDY Magrit, LIETAER Bernard, Monnaies Régionales : de nouvelles voies vers une prospérité durable, Editions Charles-Léopold Mayer, 2008

(3) GESELL Silvio, L’ordre économique naturel. Trad. Félix Swinne de la 8e édition allemande, Editions Marcel Rivière, 1948, Paris
http://www.silvio-gesell.de/html/oen_08.html